«En 2003, je n’étais pas sobre. Sinon, je suis plus ou moins le même mec.» Slash répond au téléphone depuis sa maison de Los Angeles. Relax. On l’avait rencontré «en haut-de-forme et en os» en 2003, lors de la création de Velvet Revolver, «supergroupe» miné avant même sa naissance par les cures de désintoxication du chanteur, Scott Weiland, ancien meneur des Stone Temple Pilots. «Cette expérience m’a définitivement fâché avec les chanteurs fous! Je voulais un vrai contrôle sur ma musique, et vider mes tiroirs.»
Sept ans plus tard, Velvet Revolver désarmé dans l’indifférence générale, Slash sort son premier disque solo, porté par les voix de treize invités de marque. Un album qui fait parler de lui et renoue avec l’inspiration du jeune gunner, âgé aujourd’hui de 45 ans.
– Comment invite-t-on sur son disque la crème du hard rock américain?
– Ce n’était pas totalement simple! J’ai dû prendre mon téléphone, me montrer convaincant, faire des démos… Mon nom seul ne m’a pas ouvert toutes les portes.
– Une histoire d’amitié?
– De musique, surtout. En fonction de la voix que j’imaginais sur chaque morceau, j’ai commencé par appeler mes amis, Ozzy Osbourne (Black Sabbath ), Lemmy Kilmister (Motörhead), Iggy Pop, des gars que je connais très bien. Ensuite, les chanteurs que j’avais souvent croisés sans vraiment faire leur connaissance, comme Chris Cornell (Soundgarden). Enfin, des gens que je n’ai jamais rencontrés. Les rares refus ont résulté de raisons contractuelles. Mais j’ai eu tous ceux que je voulais vraiment.
– Pourquoi ne chantez-vous pas?
– C’est une question de personnalité, je n’aime pas porter mes sentiments sur mon t-shirt. La guitare est une arme d’attaque, mais aussi un bouclier.
– Qui sont les grands guitaristes en 2010?
– Ceux avec qui j’ai grandi! Eric Clapton, Joe Perry (Aerosmith) , Billy Gibbons (ZZ Top)… Ils sont toujours là. Jack White est le seul nom d’un nouveau guitariste charismatique qui me vient à l’esprit.
– Comment expliquez-vous que la virtuosité soit encore liée à des noms apparus dans les années 1960 et 1970?
– C’est un reflet de l’industrie musicale. Je suis sûr qu’il y a des centaines d’incroyables guitaristes dehors mais que personne ne leur donne plus le minimum vital pour se faire connaître et exister. Toute l’industrie a peur, le succès doit être immédiat, la rentabilité également. Les exemples d’incroyables talents surgis d’un premier disque sont pourtant rares.
– Il y a eu Hendrix. Que pensez-vous de son «nouveau» disque, Valleys of Neptune?
– Je n’étais pas forcément d’accord quant à son opportunité, sans Hendrix pour approuver le résultat final. Mais je dois dire que c’est un album excellent. Il joue de façon phénoménale et chacun devrait y porter une oreille.
– Vous avez collaboré sur l’album Dangerous, de Michael Jackson. Que vous a inspiré sa mort?
– C’est triste. Je ne sais pas quel autre mot utiliser. Ses dix dernières années furent un gâchis tragique. C’était un mec super et peut-être le seul musicien dont l’étiquette de «génie» n’était pas surévaluée. Travailler avec lui était fabuleux, il adorait son job de musicien. En dehors de ce cadre, je ne peux pas me prononcer sur son bonheur personnel. Mais dans son boulot il était heureux!
– La question qui fâche: Chinese Democracy, que le chanteur Axl Rose a mené en 2008 sans aucun membre originel, est-il un disque des Guns N’Roses?
– Axl voulait absolument garder ce nom pour faire son truc, mais Guns était un groupe, pas juste un nom! Cinq personnes qui jouaient ensemble. Et là, c’est Axl avec ses musiciens. Ce n’est pas un album que Guns aurait fait, voulu faire ou pu faire! L’important est que sa sortie a fait du bien à Axl. Et moi, ça me fait du bien de savoir enfin où il voulait en venir avec ses théories sur son disque! S’il me l’a envoyé? Non! (Rire) Maintenant que vous m’en parlez, je ne sais même plus comment je l’ai eu!